Algérie

Le désert.
Le Sahara.

A priori, quand on aime les animaux, la nature verdoyante, ce n'est pas la destination rêvée, ou tout du moins ce n'est pas la destination dont on rêve !

Mais bon, les espaces Sahariens et leurs habitants, les Touaregs ou encore les Maures, font partie de notre imaginaire d'enfant, aidé par les récits d'aventuriers, les histoires d'hommes qui meurent de soif auprès des squelettes d'animaux n'ayant pas réussi non plus à gagner le puit.

En fait, on se dit que ce sont des paysages qu'il faut voir, des hommes qu'il faut rencontrer,
que ce sont des ambiances qu'il faut connaître !

Le choix de la destination est cornélien tant les agences proposent des pays divers et des treks variés. 
Comment choisir entre des dunes Mauritaniennes et des dunes Algériennes ?
Entre le désert du Ténéré au Niger et celui de l'Akakus en Libye?
Alors, et si le choix était celui de la zone la moins fréquentée,
ou plutôt réputée comme la moins fréquentable ?

Mon choix s'arrête donc en cette fin 2002 sur l'Algérie et la zone Sud-Est proche de Djanet, le désert de la Tadrart, réputé comme étant l'un des plus beaux compromis sables-roches de tout le Sahara.





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  Survol du Tassili N'Ajjer. Ce plateau montagneux au Nord de Djanet, culminant à plus de 1000m d'altitude, est classé par l'UNESCO, au patrimoine mondial de l'humanité tant il recèle des richesses préhistoriques.
    Djanet est la ville la plus Sud-Est de l'Algérie. A l'Ouest s'étend le Tassili du Hoggar et les hautes montagnes du Hoggar. A l'Est, c'est l'Akakus Libyen et ses sables rouges. Plus au Sud, ce sont les grands déserts Nigériens, le Djado et le Ténéré. Sur cette route, à la croisée des frontières Libyennes et Nigériennes, c'est la Tadrart; un Tassili de grès noir, réputé pour ses sables rouges comme il en n'existe nulle part ailleurs.



     Quand on a l'habitude de fréquenter les aéroports internationaux, on est un peu surpris par celui de Djanet. A peine 3 hangars, quelques vieux hélicoptères de l'armée, et .... le sable. Tout autour de ce minuscule tarmac à 30 kms de l'oasis, c'est le désert. On n'est pas encore arrivés qu'on y est déjà !!



     Les 4x4 nous attendent pour 150 kms de piste. On fonce tout de suite plein Sud. Le désert de la Tadrart est très éloigné. Il n'y a pas de points d'eau pour les chameaux là-bas. Toute la logistique est alors assurée par des véhicules. Certains sont récents, mais d'autres datent un peu; du temps où la guerre civile Algérienne n'avait pas encore affecté l'activité touristique. Les Algériens du grand sud ont souffert pendant 10 ans, à 2000 kms des zones de conflits, de l'interdiction de tourisme alors leur source de revenus principaux. En 2002, les touristes commencent à revenir en nombre.
     On se sent alors l'âme d'un pionnier, ouvert aux richesses que nos hôtes voudront bien nous dévoiler.



     Premier bivouac. Premier contact avec le sable du Sahara qui m'a tant fait rêvé. Première nuit sous les étoiles. Première nuit dans le silence absolu. Premier réveil dans le froid matinal du désert.



    Le pays des Touaregs. Kuzo, notre guide Touareg, est âgé, mais nous ne connaîtrons pas son âge exact. Il était précédemment éleveur de chameaux (des dromadaires, mais dans tout le monde arabe on dit chameaux). La désertification des zones de pâturage l'a poussé à changer de métier. Il ne quitte pas un instant son chèche vert, la couleur du chèche du voyage, et nous lance régulièrement des oeillades malicieuses.



    Il n'y a pas de carte détaillée de la zone que nous allons découvrir. Alors, nous suivons en toute tranquillité dans la douceur de l'hiver saharien, les pas de nos accompagnateurs. Nous allons marcher dans le lit du large oued In Djaren, n'ayant pas vu d'eau depuis plusieurs décades, avant de traverser des cirques dunaires dorés, orangés ou rouges, souvent bordés de belles falaises noires. Le pas est lent, nous avons le temps, chacun trouve son rythme et son espace de solitude si besoin.



    Le vent et le sable ont façonné au fil des siècles des formes étranges. Ainsi, on le verra, pitons rocheux, éboulis, cheminées, arches comme celle de Tamesguida vont se succéder tout au long de nos randonnées.
    Les acacias, peu nombreux c'est vrai, ont su résister aux difficultés que la nature a imposées dans ces zones hostiles à la vie.




    Nos marches sont régulièrement ponctuées d'observations de magnifiques peintures rupestres. Quelle surprise et quel bonheur ! La région des Ajjers plus au Nord, est réputée pour ses grottes décorées, mais le désert de la Tadrart recèle également certains bijoux rupestres. 
   Contempler ces dessins ancestraux provoque une émotion importante, on sent alors une grande humilité nous envahir et un grand respect pour ces hommes et femmes nous gagner.
   La finesse du trait, le goût du détail, nous rappelle que l'Homme a toujours été un artiste. Mais, quand ces peintures ont elles été réalisées ? Par qui ? On a alors envie d'en savoir plus. Si vous le souhaitez, vous pouvez visiter la "galerie de peintures rupestres de la Tadrart"



    Le sable commence à rougir, nous avons quitté l'oued In Djaren, le vent nous épargne, mais il doit souffler souvent dans ces larges vallées encaissées. Il soulève et déplace le sable, nous laissant découvrir quelques précieux débris de poteries anciennes; les plus chanceux ont même le plaisir de dénicher un fragment de silex taillé. Difficile de résister à l'envie de ramasser ces vestiges tentants, mais néanmoins patrimoine de ce parc national !



    Kuzo s'isole régulièrement pour prier. Il s'isole également de temps en temps pour s'allonger au soleil et s'emplir de sa chaleur et de son énergie. Il nous apprend comment le faire avec le corps et .... avec l'esprit. On se sent effectivement régénéré après une séance "prise d'énergie solaire" !




    Les gravures. Toutes aussi émouvantes que les peintures. Nous apprenons que plusieurs ères se sont succédées dans ces lieux et que les gravures et écritures se sont gravées les unes près des autres ou les unes sur les autres, par des hommes de cultures, voire d'origines différentes. (Voir la "galerie de gravures rupestres de la Tadrart" )



    Les roches déchirées des cimes des falaises offrent parfois des contours étonnants lorsque le jour tombe....



    A l'approche des dunes de Moulanaga que l'on nous promet oranges et nombreuses. La rocaille va bientôt laisser la place au sable et à la pureté des éléments...



    Nous sommes en décembre, c'est également l'hiver au Sahara. 25-30 degrés la journée, un fond de l'air un peu frais, mais pas suffisamment pour ne pas transpirer lors de l'ascension des dunes en plein soleil !
    Le soir, il fait bon près du feu de branches d'acacias glanées ça et là. La nuit, un sac de couchage résistant au froid et une petite laine ne sont pas inutiles pour affronter les 5 degrés et moins.
    Souvenirs de bivouac au creux des sables : lecture captivante à la lumière de la lampe frontale de "Ébène" de Ryszard Kapuscinski. Un bonnet sur la tête. Pas facile les gants pour tourner les pages ! Froid le bout du nez !!



    Cette fois, nous sommes dans les vagues. Les images les plus artistiques des ouvrages sur le Sahara reviennent à l'esprit.....



    La prière vers la lune. Kuzo s'était immobilisé en direction de la Mecque. La pleine lune en point de mire. Elle nous accompagne toute la semaine, et brille très fort, bien ronde chaque nuit, au point que les étoiles en sont parfois difficiles à observer. Elle m'empêche presque de dormir certaines nuits tant sa lumière est intense.



    Nous avons la chance de passer une nuit dans ce cadre merveilleux que forment les dunes de Moulanaga. Jamais je n'avais pu "écouter" un silence aussi impressionnant. On a beau tendre l'oreille, rien, rien de rien. Pas un bruit, pas un souffle, rien. J'entends juste un très léger sifflement au creux de mes oreilles, que j'attribue au "bruit naturel" de mon corps.



    Les marcheurs s'égrènent au fil des heures. 3-4 heures le matin, 2-3 heures l'après-midi. Les dunes s'élèvent également. La marche n'est pas très difficile sur le sable contrairement à ce qu'on pourrait penser. Le sol du versant de cette belle dune est très ferme. On s'enfonce par contre jusqu'aux chevilles de l'autre côté.



    Les animaux. Ils résistent malgré tout. Ce lézard est le seul que je vois, mais ses congénères sont nombreux au vu des traces matinales dans le sable. Nous voyons quelques oiseaux noirs et blancs cherchant à chiper les miettes de nos repas, et 2 souris désireuses de goûter à la taguella, ce délicieux pain cuit dans le sable, que nous a préparé Mohamed notre cuisinier.



    Un petit buisson d'épines isolé au milieu des sables. Je me penche pour y poser la paume de ma main et sentir les pointes acérées de ses fines branches. Et j'aperçois ce gros criquet. Seul. Perdu ? Il n'est pas effrayé et ne réagit pas à ma présence.



    Solitude du marcheur au sommet des dunes....



    Ce jour là, Kuzo était un peu "perdu". Nous aurions dû déjà apercevoir les 4x4 nous attendant pour le bivouac. Pas de traces. Il décide de gravir une colline par la crête d'une longue dune. Je le suis avec difficultés et découvre le reste du groupe très loin dans le bas, petits grains de sable dans les sables. Kuzo nous demande ensuite de rester l'attendre au centre de ce cirque pendant qu'il part d'un pas vif à la recherche de notre logistique. Il n'avait pas vu le bivouac du haut de ce promontoire....



    Pureté. Ce terme revient souvent dans le langage des marcheurs du désert. Ce mot vient spontanément à la vision des formes géométriques parfaites des dunes et du bleu profond du ciel.



    "La route c'est par là !!". La grande dune rouge de Tin Merzouga dépasse les sommets. Il nous faudra encore marcher une journée entière avant de l'atteindre.



    On vient marcher dans le désert de la Tadrart pour y voir son sable rouge. On n'y croit vraiment que lorsqu'on le voit. Et il est vraiment rouge !!!



    Le hérisson du désert....



    Le maître et son disciple. Originaire de Djanet, Mahmoud accompagne régulièrement Kuzo pendant ses vacances afin d'assurer la traduction Français-Tamacheq. En 5ème année de médecine à Alger, il attend le jour où il pourra venir exercer son métier chez lui, et pourquoi pas continuer à accompagner les touristes, leur montrer les beautés naturelles de sa région...et leur expliquer la magie des étoiles.



Les gardiens de Tin Merzouga...



    Le désert de la Tadrart n'est pas que sables et dunes. Les pics rocheux aux contours déchirés sont également nombreux. C'est après 45 mn d'efforts et 250m d'ascension, s'enfonçant jusqu'à mi-mollets, le souffle court, couverts de transpiration, que nous atteignons le sommet de Tin Merzouga. Nous y contemplons un soleil terriblement brillant, se coucher derrière ces crêtes enrobées de brumes.



    Alors que le soleil s'éteint vers le Hoggar, la lune s'élève, elle, au dessus du désert de l'Akakus en Libye.



    Certains endroits offrent encore un peu de verdure. L'effet des nappes souterraines certainement. Jadis, des troupeaux venus de Djanet pouvaient paître ici et là dans la Tadrart. C'est terminé à présent. Il ne pleut plus dans ce désert. Les animaux n'y auraient plus rien à manger. Ni à boire d'ailleurs. Les voitures les ont quasiment remplacés de toute façon.



    Encore quelques pas dans ces sables rouges, au milieu des pierres noires souvent difformes, et nous devrons monter dans les véhicules nous ramenant vers Djanet. Nous allons retrouver la civilisation après 6 jours sans rencontrer âme qui vive. 




    Attention, beauté et émotion ! Nous sommes à Teghaghart. Une haute roche plantée dans les sables, à quelques 20 kms de Djanet. C'est le site archéologique connu sous le nom de "la vache qui pleure".
    Des visages bovins observent leurs visiteurs et l'un d'entre eux laisse couler une énorme larme. L'histoire raconte que les éleveurs faisaient paître et boire leurs vaches à cet endroit, puis migraient vers de nouveaux herbages le temps d'une saison. Une année, à leur retour, il n'avait pas plu, l'herbe n'avait pas repoussé et les puits étaient vides. Les vaches se sont alors mises à pleurer...avant de mourir.



    Arrivée à Djanet. Nous sommes vendredi, c'est donc jour de prière et les hommes sont endimanchés pour se rendre à la mosquée. Les dattiers nous dévoilent leurs bottes de fruits dorés dominant salades, carottes et autres légumes ou fruits, poussant sans problèmes dans la fraîcheur et l'humidité de la palmeraie. Comme il va être bon de prendre le pouls de cette petite ville animée du coeur du Sahara !
    La ville de Djanet comporterait 72 sources; ainsi, les eaux en provenance du Nord gonflent l'oued si fortement lors de la saison des pluies qu'il faut le canaliser pour éviter les inondations. Il paraît que jadis les maisons en bas de la colline étaient régulièrement noyées.



    Une petite incursion au coeur de la vieille ville permet d'observer comment cette dernière s'est développée sur le flanc de la colline qui domine la vallée verte de milliers de dattiers. Les ruines de pierres ont laissé la place aux constructions de béton garnies d'antennes paraboliques à l'écoute du monde. On a beau être au coeur du plus vaste désert de la planète, on n'en est pas moins moderne !



    La majorité de la population de Djanet est Touareg, les Arabes et les Berbères venus du Nord sont bien moins nombreux. La religion musulmane est au coeur de chacune des vies de cette cité, mais pas d'intégristes dans les mosquées ici.
    La ville fut il y a très longtemps, sous le joug d'un terrible tyran, exécutant ceux qui ne réussissaient pas à lui apporter du couscous chaud, après l'avoir amené depuis un village voisin distant de 7 kms et alors qu'ils avaient les pieds entravés. 



    Ce petit garçon noir africain me rappelle ce que j'avais pu lire avant de partir : Djanet est un lieu de passage très important pour de nombreux Africains d'Afrique noire, en situation irrégulière, et en quête d'un improbable futur doré en Europe.
    Ceux qui arrivent jusqu'ici sont chanceux de ne pas avoir été abandonnés au coeur des sables par leurs passeurs. Ils sont souvent ruinés par ce qu'ils ont du payer pour faire tout ce trajet. Bloqués à Djanet, parfois endettés, ils doivent se résigner à travailler très dur, pour peu, en espérant se renflouer pour atteindre leur but.
    Une rencontre avec un bien triste Sénégalais originaire de Casamance, me confirme la véracité de ce drame humain.



    Les bouchers Algériens de Djanet ne manquent pas d'humour en tout cas ! Quand je disais que les 4x4 avaient remplacé les chameaux !!



    "Vous avez aimé mon pays ?" nous demande Kuzo. 

    "Oui ?", rajoute-t-il, "Alors n'oubliez pas de dire à vos amis qui souhaiteraient lui rendre visite, qu'il est fragile, qu'il est précieux, et qu'il convient de le respecter. Et puis, dites leur également de faire preuve d'humilité s'ils viennent ! Alors, nous les Touaregs, nous serons là pour dévoiler ses richesses et leur apprendre un peu de notre culture ancestrale, comme nous vous l'avons appris durant cette semaine."

    "Merci Kuzo pour ces conseils, je leur dirai, promis !!"



 
 
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